LAINVILLE Patrick

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Sculpteur
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M. Patrick LAINVILLE

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Mon Histoire

Article publié dans le livre Artistes Occitanie, les 30 artistes 2023, publié en novembre 2022
Quatrième volume de la collection Artistes Occitanie, les 30 artistes de l’année.
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Saint-Sozy (46)
Patrick Lainville
La préhistoire de demain

Patrick Lainville travaille toutes ses sculptures, petites ou grandes, dans la lignée des forgerons. Qu’il choisisse de rester dans des formes droites et anguleuses ou au contraire de développer des courbes, le sculpteur cherche avec ses coups de marteau sur le fer rougi un équilibre, une forme qui semble évidente.
L’évidence par exemple d’une lance antique, une “haste” qui a notamment séduit Michel Bras, qui en a installées au Suquet, son restaurant sur l’Aubrac, touché par la forme, mais également par le lien qui relie l’oeuvre à un passé qui lui parle : “Lorsque je pose mon regard sur les hastes de Patrick Lainville, il retentit dans mes souvenirs le son d’une enclume, le crépitement d’un foyer, je ressens l’odeur de cette forge, je perçois le bain tourmenté par la trempe du fer… Inéluctablement, je suis dans l’antre du hangar qui servait d’abri à la forge de Papa (…) ”, explique le chef cuisinier dans le livre co-réalisé avec l’artiste en 2022, Cinabre.
Le fer, l’artiste le travaille donc parfois à chaud, notamment quand il souhaite tordre et écarter les barres pour y laisser apparaître un peu de vide, un peu de jour. Une fois installée dans un espace naturel, cette ouverture permet à la nature de jouer sa partition au milieu de l’œuvre. Le métal est contraint, mais l’artiste- forgeron, par son action, lui donne des formes, des vibrations, des irrégularités qui lui donnent vie et lui per- mettent finalement de se fondre dans l’univers du vivant. Patrick Lainville estime que sa recherche de formes pures, droites, mais dotées d’une vibration ap- portée par le métier de forgeron, vient en partie de son histoire familiale: “Mon intérêt pour la ligne droite vient de mon intérêt pour l’architecture. Mon père était architecte, et depuis j’ai poursuivi en approfondissant un peu cette question. Aux Beaux-arts, j’avais travaillé sur le nomadisme en architecture ”.
Mais l’artiste le travaille également à la meule quand il cherche des formes plus lisses ou arrondies. Dans tous les cas, le travail s’inscrit dans une démarche maîtrisée, où les formes sont définies avant que l’outil inter- vienne.
Pour les œuvres de grande dimension, l’artiste fait toujours un patron sur une feuille de papier. “ Je ne pars pas à l’aventure sur de grands formats, car le fer, qu’on le veuille ou non, garde la trace des coups de marteau ou des courbures. Si on veut des œuvres pures, il faut donc préparer les formes recherchées ”.
“ Je pars toujours d’une idée, je fais des dessins, mais je peux les laisser mûrir plusieurs mois, voire plusieurs an- nées. Ensuite, mon travail s’apparente à une partition musicale : je cherche l’équilibre entre les pleins et les silences, entre les ombres et la lumière.
Je travaille essentiellement le fer, parfois le cuivre, et par- fois les deux qui se marient assez bien et qui me per- mettent de jouer sur les couleurs ”.
Quelles qu’elles soit, ces oeuvres trouvent très bien leur place au milieu de la nature : au milieu des arbres, des racines, mais tout aussi bien dans le mouvement de l’eau d’une rivière. Sous son marteau, le métal semble avoir autant vécu que le galet roulé dans l’eau, ou la racine qui s’est extrait du sol. Le travail de l’homme en symbiose avec celui de la nature. Parfois, ses sculptures peuvent suggérer des formes figuratives,
mais ni plus ni moins que cela se produit parfois avec un bout de bois ou un caillou. “ Je ne rejette pas les interprétations figuratives de mes œuvres, mais ce sont des interprétations au milieu d’autres possibilités. Rien de plus ”.
Et comme le galet ou le bois flotté qui continuent à être modelés par les flots tant qu’ils restent dans la rivière, les oeuvres de Patrick Lainville, quand elles sont en extérieur, continuent à évoluer, au fil du temps et des climats
Cette propriété intrinsèque du fer, toujours menacé par la rouille, lui donne une puissance d’évocation dé- multipliée : les sculptures de l’artiste peuvent évoquer le retour à la terre d’où il est extrait, mais tout aussi bien les constructions qu’il a permis et, dans les deux cas, un sentiment de fragilité et de précarité.
Il a ainsi réalisé toute une série de sculptures verticales, suite à un voyage à New-York. “ Je n’ai pas l’habitude d’un horizon barré par des architectures. J’habite dans un monde rural où je vois de mon atelier de forge un horizon lointain qui porte sur des kilomètres. Plus tard m’est venue instinctivement l’idée de forger mes barres en souvenir de ce périple. Pour ces sculptures, j’ai juste retouché par des empreintes de mon marteau-pilon le haut afin de laisser la verticalité se déployer dans un essai du peu (…) Silence vertigineux du peu. Je m’y essaie ; solitude habitée de la ville vide ”.
L’artiste joue parfois, en faisant volontairement rouiller le métal au moment même de la création, pour obtenir des noir tirant vers le bleu, ou des ocres. Mais, comme on retire un bois flotté de l’eau, l’artiste ralentit ensuite le processus en vernissant son travail.
Ce double intérêt de l’artiste, à la fois pour la matière et pour les formes épurées, se retrouve également quand il travaille en deux dimensions : sur des papiers chiffons assez épais, il fait apparaître des formes par le biais de brûlures. Une manière de suggérer que l’art du forgeron peut aussi laisser des traces plus fragiles qu’une barre d’acier solide, dure, immuable.
Anne Devailly
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Né à Valence en 1969. Enfance à Nyons, au nord de Vaisons-la-Romaine. Il revient à Valence pour suivre les Beaux-Arts, où il obtient son DNSEP en 1990.
Installé aujourd’hui dans le nord du Lot.
Il présente son travail à Paris et dans le sud-ouest (notamment au Café Bras du Musée Soulages) depuis 1990 ainsi que dans le restaurant de Michel Bras, Le Suquet, à Laguiole.
Galerie Amélie – IXè Paris • Galerie Rastoll – Paris • Galerie Bénédicte Giniaux – Bergerac • Galerie artenostrum – Dieulefit (Drôme)
2022 : Parution du livre Cinabre, en collaboration avec Michel et Sébas- tien Bras.
Collection particulière : Thibaut de Reimpre – Crannes en Champagne

« Les 30 Artistes Occitanie »
Présent dans l'édition 2020 ou 2021
Galerie virtuelle