A Toulouse, le plasticien James Colomina expose une oeuvre percutante dans une église
Le sculpteur toulousain James Colomina est connu pour installer un peu partout en France et plus loin des sculptures qui font toujours référence à un sujet d’actualité: Emmanuel Macron devant une tente de réfugié sur les quais de Seine à Paris, un enfant qui essaie de faire de la balançoire malgré tout dans un quartier déshérité de Bristol (Angleterre), une petite fille qui plante des tournesols (emblème de l’Ukraine) à Kiev, etc;
Toutes ces oeuvres reconnaissables entre toutes par leur apparence: des sculptures en résine toujours d’un rouge brillant.
Aujourd’hui, l’artiste n’a rien installé dans l’espace extérieur mais a choisi de frapper encore plus les esprits en exposant dans un lieu spécifique à une date précise: Silentium, oeuvre représentant l’Abbé Pierre, a été montrée dans l’Eglise du Gesu pour le vendredi et le samedi de la Toussaint, les 1er et 2 novembre.
L’artiste a ainsi choisi d’aborder avec force les abus commis au sein de l’Église, à travers une œuvre représentant celui dont l’image a profondément changé ses derniers mois, l’Abbé Pierre.
L’oeuvre est cette fois-ci pour la première fois, d’un blanc immaculé.
« Aujourd’hui, mon parcours artistique a évolué, nous explique l’artiste. Je souhaite que mes sculptures rencontrent un contexte intérieur, où elles peuvent être perçues dans une lumière différente, presque introspective.
C’est dans cette optique que j’ai choisi le blanc pour mes nouvelles installations. Cette couleur, plus sobre et raffinée, permet de focaliser l’attention sur la forme et l’essence de la sculpture elle-même, sans l’impact saisissant du rouge.
Ce choix symbolique marque un tournant pour moi. Le blanc évoque le silence et la contemplation, un état qui convient à des lieux plus solennels où le spectateur est déjà disposé à une immersion artistique« .
Silentium représente l’Abbé Pierre allongé sur son lit de préparation mortuaire. Sous les plis du drap, un détail saillant apparaît, un sexe en érection, attirant l’attention sur les horreurs commises au sein de l’Église et mettant en lumière les abus bien réels dont l’Abbé Pierre et d’autres figures religieuses ont été accusés.
« Le drap jeté sur cette bosse, symbolise le voile que la société s’efforce souvent de placer sur des réalités scandaleuses et insoutenables« , précise l’équipe de l’artiste. « Cette installation rappelle que même après la mort, les blessures et les traumatismes causés par ces actes continuent d’imprégner la mémoire collective, hantant les victimes et l’ensemble de la société. Elle incite ainsi à regarder en face des réalités encore passées sous silence.
Pour accompagner cette installation, James Colomina avait choisi de diffuser des chants liturgiques en latin, renforçant ainsi l’atmosphère solennelle et introspective de l’œuvre« .
« J’ai longtemps cru que les symboles sacrés devaient demeurer intouchables, au-dessus de toute remise en question, ajoute l’artiste. Mais pourquoi fermer les yeux ? Si l’Église a tenté de dissimuler certaines vérités, il incombe alors à la société de lever le voile, afin de révéler ce qui a été enfoui sous des décennies de silence.»