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Rudolph Berthoux, Ariège

Le bonheur avec rigueur

 

Dans son atelier de Mirepoix, au pied des Pyrénées, Rudolph Berthoux cherche l’équation impossible : comment, en mélangeant formes végétales et organiques, proposer un univers (sculptures, peintures, illustrations) qui fasse la symbiose entre l’être humain et son environnement.

Les peintures sont colorées, gaies, riantes. Les sculptures évoquent des bestioles ou des végétaux inconnus mais qui donnent envie d’aller voir, toucher, sentir. Les illustrations, elles, présentent une nature ordonnée et foisonnante.

A première vue, le travail de Rudolph Berthoux ne fait pas très contemporain, et convoque des références assez nombreuses et variées : on peut penser devant ses formes concentriques aux Viennois, Klimt au début du XXè ou Hundertwasser quelques décennies plus tard, mais on peut aussi aller chercher du côté des cercles de lumière de Sonia Delaunay, des formes de l’architecte espagnol Gaudi ou des couleurs flashy du Flower power des années 60 et 70 : « Toutes ces références ne me dérangent pas, ce sont vraiment ces univers-là que j’aime ! » précise avec simplicité l’artiste.
Pour autant, ces influences ne sont pas si pesantes que cela, et sont même très atténuées si l’on regarde l’œuvre dans son ensemble : il y a une unité de style, une palette identifiable, une volonté de présenter les choses de manière vive, résolument gai, mais tout cela avec une grande rigueur : l’artiste crée et cherche dans toutes ses œuvres à rendre compte de la vitalité de son environnement, avec une ligne de conduite qui lui permet de construire une œuvre cohérente, où des passerelles conduisent avec naturel d’une peinture à une sculpture ou une illustration : il dessine ainsi un motif de vague qu’on pourrait trouver sur un papier peint : on le retrouve dans une sculpture, mais la vague évoque cette fois-ci davantage une forme nettement plus animale que végétale ; les cercles concentriques qui grouillent dans sa peinture et évoquent clairement la lumière à la façon de Sonia Delaunay se transforment en bâtons microbiens dans les dessins, etc.

« J’ai un cahier sur lequel je note toutes sortes d’idées qui me traversent l’esprit, des idées qui viennent généralement de mon environnement. Après, cela peut déboucher sur des œuvres plus ou moins figuratives, sur de l’illustration, sur de la sculpture ».

Ces œuvres ont un point commun : une vision de la nature dans lequel l’artiste puise à la fois ses couleurs et ses formes. « On est dans une société où on se dit tous, que notre rapport à la nature est de pire en pire. C’est d’autant plus nécessaire dans ces conditions de mettre en valeur tout ce qu’elle peut nous apporter ». Ce n’est pas de l’optimisme béat, ni de la naïveté, c’est un parti pris de montrer que la nature apporte aussi bien les couleurs, que les formes ou les matières. Pour enfoncer le clou, l’artiste utilise très peu le noir, qui ne sert guère qu’à faire les traits dans les illustrations, et encore, bien souvent les traits de contour sont eux-mêmes de couleur. Les Néerlandais du XVIIè étaient à la recherche de la tulipe noire… Rudolph Berthoux, lui, s’accommode très bien d’une nature où cette non-couleur est finalement très peu présente.

Dans son atelier, l’artiste alterne les supports en fonction de ce qu’il a envie de travailler, le volume, la couleur ou le trait. Il en ressort des œuvres sculptées, peintes ou dessinées,  qui ont pour point commun de ne jamais porter de titre : « Je ne veux pas leur donner de nom car je suis toujours à la limite entre le figuratif et l’abstrait. Un titre ferait pencher la balance d’un côté ou de l’autre ».

Pour l’instant, ses sculptures sont toutes monochromes, souvent blanches, jaunes ou dorées, mais l’artiste n’exclut pas à l’avenir de travailler sur les formes sculptées dans la terre cuite de s’autoriser plusieurs couleurs, toujours dans un univers qui privilégie clarté et lumière.
Quand on fait remarquer que Klimt est connu pour ses œuvres les plus colorées, mais qu’il avait aussi développé « en contrepoint » des œuvres beaucoup plus graves et angoissantes, Rudolph Berthoux répond simplement : « Peut-être qu’un jour, moi aussi, je ressentirai la nécessité d’un travail à l’opposé de mon œuvre actuelle, mais ce n’est vraiment pas à l’ordre du jour. Il y a dans l’art contemporain tellement d’artistes qui passent leur temps à détruire. Détruire, c’est très rapide. Construire, que ce soit dans le domaine du bâtiment ou de l’art, c’est beaucoup plus compliqué. C’est cela qui demande du temps, de la réflexion et qui me passionne ».

Le travail de Rudolph Berthoux est en cohérence avec son choix de vie : « Je suis originaire de Lyon, ma femme est néerlandaise et sa famille vit en Espagne. Mon objectif, en m’installant à Mirepoix, était clairement de changer de vie, de retrouver une vie, un lieu, un environnement à échelle humaine, et en même temps un lieu de passage où on pourrait retrouver ce brassage dans lequel je baigne avec ma famille. Et c’est bien le cas ici : la région accueille de très nombreux touristes, Anglais, Hollandais, Espagnols, qui sont comme nous attirés par cette nature variée et préservée ».

Cette population, cosmopolite, se retrouve donc dans une passion commune pour une vie en phase avec la nature. Et, de manière finalement simple et fluide, la peinture de Rudolph Berthoux s’intègre dans cet univers qui transcende les cultures.

A.D.

Article paru en novembre 2016

Bio

Rudolph Berthoux a une formation de menuisier et d’agenceur mais c’est dans l’architecture d’intérieur qu’il a exercé pendant une quinzaine d’années à Paris, en Bretagne, à Lyon ou en Espagne : agencement de magasin, création de concept, graphiste.

En parallèle, il a toujours peint et sculpté le week-end.

Il y a quatre ans, il s’est décidé à franchir le pas et aujourd’hui il peint, sculpte ou dessine à plein temps.

http://www.rudolphberthoux.com/

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