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Philippe Gauberti

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Philippe Gauberti, Hautes-Pyrénées

Le miroir aux alouettes de Philippe Gauberti

 

Philippe Gauberti réalise des sculptures qui semblent extrêmement légères, prêtes parfois à s’envoler. Il travaille pourtant les métaux les plus lourds qui soient, l’inox et l’acier.

Un univers qui joue sur la dualité qui existe entre la froide rigidité du métal d’un côté et la légèreté liquide des lignes obtenues par son travail de l’autre.

Certaines œuvres respirent les sentiments de légèreté, de facilité ou d’évidence même, au point qu’on en oublie le travail qui a permis d’y parvenir. C’est vrai d’une symphonie de Mozart, d’un sonnet de Verlaine ou de quelques pas de danse d’un grand danseur. Les œuvres de Philippe Gauberti appartiennent à cette veine-là : la maîtrise technique est indispensable pour parvenir au résultat souhaité, mais se fait volontiers oubliée. Ce n’est pas elle qui compte. Pas de virtuosité mais de la simplicité évidence et de la légèreté avant tout.

Les Odalisks par exemple avec leurs formes sensuelles, font penser à des  animalcules  voguant avec plus ou moins de perfection dans le milieu atmosphérique. La forme est simple, douce, et le sentiment de légèreté est renforcé par les couleurs: généralement un orange lumineux se jouent d’un sensuel mariage à l’inox poli miroir. (La sculpture ou le socle).

Dans les deux cas, la lumière fait partie intégrante de l’œuvre et offre des tableaux changeants dès qu’on se déplace autour d’elle.

Derrière ce résultat pourtant, une technique éprouvante et finalement davantage utilisée dans le milieu industriel que par les artistes : l’acier à froid. Ce métal est façonné à froid, par des outils qui contraignent peu à peu les formes. Anne-Marie David-Serres  décrit ainsi la technique de réalisation d’une Odalisk : « Le façonnage résulte d’un formatage soudé centimètre par centimètre. L’assemblage des plaques par une torsion forcée du métal crée l’allure. Le mouvement est obtenu au forceps par des lignes parallèles, mais asymétriques ».
Quand l’artiste a obtenu les formes et volumes souhaités, il réalise alors un moule et en tire quatre exemplaires en résine et poudre de marbre qu’il dote de traitement de surface différent. Le résultat final est là, intégrant l’ensemble de ces paramètres, et jouant du paradoxe : la sculpture semble vaporeuse mais les tensions si caractéristiques du métal sont toujours présentes soutenant le paradoxe.

Philippe Gauberti a développé sur ce principe plusieurs thèmes de sculptures, en orchestrant à chaque fois des faux-semblants offerts par les formes, les couleurs et les matériaux.

Se jouant donc de nous, Philippe Gauberti décide par exemple d’offrir à certaines de ces Odalisks une finition d’un vert bleu de sa composition… Quand on regarde l’œuvre elle nous apparait donc de cette couleur et pourtant si l’on cherche à l’enfermer sur une photographie, se sera uniquement le bleu qui dominera ! Pour qu’elle raison ? Mystère…..

Ces Odalisks sont posées sur des socles carrés qui pourraient les enfermer mais, malicieusement et surtout symboliquement, Philippe Gauberti place ces sculptures de manière à ce qu’une partie déborde, s’échappe délicatement.

« L’Odalisk ne peut pas être enfermée sur son socle, mais elle ne peut pas non plus être enfermée dans une photo ! » s’amuse l’artiste, roi des faux-semblants.

Quand il passe à des formes plus anguleuses avec les cubiroirs, Philippe Gauberti parvient à garder ce jeu des contraires, en travaillant l’inox poli miroir. Cette fois-ci, ce n’est pas l’ondulation face à la rigidité du métal, c’est davantage le plein et le creux, l’enfermement d’une grille et la liberté d’un miroir qui reflète l’extérieur, le cube et la sphère, etc.

Certains Cubiroirs sont simples et les cubes pourraient, si l’artiste l’avait voulu, rentrer sagement dans les « cube-dentelle» qui l’entourent. D’autres sont plus têtus, et les cubes semblent vouloir rentrer dans un cube grillagé plus grand, mais qui ne peut néanmoins tous les contenir. Parfois, c’est le cube qui semble s’échapper de la grille, parfois au contraire, le cube plein pèse de tout son poids sur le cube grillagé qui avait commencé à prendre son envol.
Qui retient qui ? Qui domine qui ?  Là encore, Philippe Gauberti, avec peu de moyens visuels, parvient à doter ces formes de volonté propre.
Aujourd’hui, Philippe Gauberti fait évoluer ces Cubiroirs vers un travail d’anamorphoses : en plaçant des demi-cubes dentelle particulièrement ajustés et des demi-sphères polies sur de l’inox miroir, on perturbe la vision. Nous sommes persuadés d’avoir sous nos yeux un cube complet et une sphère en totale lévitation. Nous pourrions le jurer et pourtant nous savons bien que tout cela n’est qu’illusion.

Depuis quelques mois, Philippe Gauberti, tout en continuant ce travail du métal, a ajouté un matériau à sa gamme, la céramique. Il réalise alors des « Envolées » de carrés multicolores (29 couleurs). On a changé de matière, on passe à une œuvre en deux dimensions, mais le travail est clairement dans la prolongation des Odalisks ou Cubiroirs : comme ces sculptures qui s’obstinent à sortir de leur socle, les carrés de céramique des Envolées s’obstinent à sortir de leur cadre. De l’air, de l’air…
Et il semble que ces sculptures murales soient en phase avec son époque : l’artiste a répondu en un an à près d’une vingtaine de commandes, en adaptant évidemment à chaque fois l’œuvre à son environnement et non pas le contraire. La lumière, la forme du mur, les couleurs environnantes, l’espace disponible, tout sera étudier pour faire de chaque Envolée un œuvre unique et  sur mesure.

La première d’envergure monumentale (8 mètres sur 4) a été installée dans le Palais de justice de Carcassonne. Cette œuvre symbolique y a trouvé sa place légitime dans la salle d’audience où juges et avocats mêlent enfermement et liberté. Une autre Envolée a suivi sur les 12 mètres de la façade extérieure de l’Hôtel Plaza*****, Place du Capitole à Toulouse, d’autres encore chez des collectionneurs.
A chaque fois, l’œuvre produit son effet : les formes sont carrées, de couleurs franches, mais elles s’envolent, elles voyagent, elles ne s’arrêtent pas…

BIO

Né en 1962, Philippe Gauberti plonge ses racines dans le Sud-Est de la France. Il s’ouvre à la sculpture en 1999 à l’occasion d’études sur le design de l’objet, menées en parallèle de son activité professionnelle. Très vite, il choisit de travailler le métal, notamment l’acier et l’inox poli miroir.

Il se forme pendant quatre ans avec un Maitre artisan en chaudronnerie, polissage, soudure, fonderie…

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Rencontre publiée en mars 2017

Site web de l’artiste

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