Madeleine Molinier-Sergio, Sète
Sète, encore et toujours
A l’huile, au pastel, à l’acrylique. Madeleine Molinier-Sergio se frotte à toutes les techniques pour réaliser des oeuvres souvent très colorées et dotées de nombreux personnages. Pour y parvenir, l’artiste privilégie les grands formats, seuls supports capables d’accueillir les fruits de son imagination. Dernièrement, l’artiste a travaillé sur une série entière en hommage à sa ville, Sète, … et aux Sétois qui la composent.
Madeleine Sergio vit avec des scènes et des couleurs plein la tête. Et si l’idée arrive en pleine nuit, alors l’artiste se lève et rejoint son atelier pour commencer ou poursuivre une œuvre. Depuis quelques temps, elle travaille sur une série, Les murs murmurent, qui rend hommage à la ville de Sète. Toute une série de tableaux, tous d’un même grand format, et tous répondant à une technique similaire : « Ces tableaux sont conçus comme des affiches déchirées, des patchworks de petits éléments. Je ne sais pas faire de tag, mais c’est ma façon à moi de montrer que les murs peuvent inspirer les artistes ! ». Chaque tableau a son sujet précis, traité par quelqu’un qui a nombre d’anecdotes à raconter sur chaque lieu, dans cette ville qu’elle connaît depuis des décennies.
Le musée Paul Valéry, le Théâtre Molière, les joutes, les halles, etc. Au total, 11 grandes toiles qui doivent être exposées cet été au Théâtre de la mer.
Certaines renvoient à des histoires connues des seuls Sétois, comme cette évocation du théâtre Chichois : « Avant, les gens se réunissaient devant leur porte. Une petite troupe de théâtre de rue passait de quartier et quartier et donnait des représentations. Les gens reconnaissaient souvent le personnage principal, ‘C’est Chichois !’ (probablement le diminutif de François). Le mot a fini par désigner le théâtre de rue ».
Madeleine Sergio travaille sans dessins préparatoires, mais avec une idée précise par tableau et une multitude de choses à dire. Quand elle représente les Halles, elle tient à ne pas oublier le jeune qui joue du bâton australien devant le bâtiment, qui prend finalement autant d’importance que la marchande de poissons. Quand elle parle du théâtre Chichois, les gens en bas du tableau sont essentiels : on a même l’impression que l’immense Arlequin qui les domine émane d’eux, ne vit que pour eux, le public.
Et quand elle s’attaque aux joutes, ce qui l’intéresse, c’est de rendre compte de l’effervescence de la journée autant que de la joute elle-même : des jouteurs, des musiciens, un homme qui semble lire, des lances mais aussi des chapeaux. Tous les éléments y sont, dans des couleurs primaires judicieusement choisies pour rendre compte du côté simple et convivial de l’événement.
Madeleine Sergio sait de quoi elle parle. Née à Paris, elle est néanmoins profondément sétoise. « Mon grand-père était le fondateur de la lance sportive. Je me souviens très bien qu’on venait lui faire l’aubade sous sa fenêtre ! ».
L’artiste s’est déjà attaqué de nombreuses fois à ce sujet, … mais toutes les toiles représentant les joutes sont parties. Preuve s’il en est besoin que les Sétois s’y reconnaissent.
Tous ces tableaux forment une série évidente, et pas uniquement à cause des sujets sétois ou des formats. Dans tous, de manière plus ou moins centrale, la musique ou les musiciens sont présents. Dans tous également, on retrouve cette densité d’éléments, jusqu’à parfois saturer la toile, comme c’est le cas dans cette toile où visages et bateaux forment un motif quasi-répétitif.
Dans tous également, Madeleine Sergio aime à intégrer des éléments disparates : de la gaze, qu’elle colle sur la toile avant de la recouvrir de peinture ; parfois elle la colle sur une partie déjà peinte et le quadrillage de la gaze reste visible, au-dessus du motif. Parfois, les tableaux peuvent intégrer des traces d’écriture : là encore, pas de recette unique. Soit il s’agit de petits collages à la manière des cubistes, soit il s’agit d’écrits réalisés par l’artiste elle-même, qui estime que le langage peut très bien venir se fondre dans une scène représentée. Madeleine Sergio peint, mais elle écrit également. A son actif, de nombreux contes pour enfants. L’écriture lui est donc aussi vitale que la couleur.
« Je travaille toujours sur plusieurs toiles à la fois. Comme je ne fais pas de dessin préalable, je ne suis pas prisonnière, je peux donc rajouter, effacer, recommencer, jusqu’à trouver les harmonies recherchées ». Et Sète, l’île singulière, se prête particulièrement bien à cette façon de travailler : un kaléidoscope de sujets et de couleurs.
Anne Devailly
Article paru en octobre 2014
Bio
Née à Paris
Installée près de Sète avec son mari, François Sergio, sculpteur.
Artiste depuis l’enfance.
A exposé depuis trente ans dans la région, notamment au Musée Paul Valéry, au Musée de Frontignan, à la Chapelle des Jésuites de Nîmes, au Musée Fabre de Montpelier, à la Chapelle des Capucins à Aigues-Mortes, et de nombreux pays.
A été sélectionnée à la Biennale de Florence, et au Centenaire du Salon d’Automne, à Paris.
Son œuvre est présente dans de nombreuses collections, notamment le Frac Antilles, l’Hôtel de Région Languedoc-Roussillon, le Musée Paul Valéry (Sète), le Musée de Frontignan, la FOndatino Canet en Roussillon, ainsi que dans des collections privées en France, Japon, Allemagne, Espagne, Afrique, Antilles.