A Mirepoix (Ariège), la maison ronde de l’architecte Serge Binotto est bien un monument historique
Le Tribunal administratif de Toulouse a confirmé que la “maison Binotto” mérite bel et bien son inscription aux monuments historiques comme cela avait été acté en août 2018, et qu’elle ne peut donc être ni démontée, ni déplacée comme le souhaitait son nouveau propriétaire.
Le Tribunal a rejeté le recours du propriétaire qui s’opposait à cette inscription. Les juges ont estimé que cette construction est “l’unique exemple d’application à une maison d’habitation de procédés constructifs industriels (panneaux métalliques émaillés montés sur place), développés au sein de l’atelier Jean Prouvé pour la réalisation de stations–services circulaires pour le compte de Total”.
Cette confirmation permet la préservation du bâtiment et empêche le propriétaire de modifier les lieux sans autorisation de l’administration en charge des monuments historiques.
Le propriétaire a néanmoins encore deux mois pour faire éventuellement appel.
Serge Binotto a construit cette maison de 90 m2 pour ses parents à l’ouest de Mirepoix en 1969. L’architecte travaillait alors dans l’atelier de l’architecte de Nancy Jean Prouvé, dont il était un des plus proches collaborateurs. Il met avec cette maison en pratique les préceptes de construction en série et d’éléments préfabriqués, préconisés par l’architecte nancéen dans les années d’après-guerre, des préceptes qui répondaient aux préoccupations de l’époque pour reconstruire le pays de manière rapide et peu coûteuse. Jean Prouvé avait notamment utilisé cette forme arrondie pour des stations services.
Mais près de cinquante ans plus tard, l’histoire prend une autre tournure. L’architecte avait revendu la maison en 2010, mais elle change de mains en 2016, pour appartenir alors au gérant d’une galerie d’art parisienne, la galerie Laffanour Downtown, spécialisée dans le mobilier des années d’après-guerre.
Le nouveau propriétaire commence à démonter la maison quand des architectes ariégeois se mobilisent pour la sauvegarde du bâtiment.
La mobilisation prend de l’ampleur et la commission régionale Architecture et patrimoine classe le bâtiment aux monuments historiques en 2018, dans l’urgence pour empêcher le démontage du bâti. Le nouveau propriétaire attaque l’arrêté de classement. Recours qui vient d’être rejeté cette semaine.
Les amis de Serge Binotto ont gagné, mais l’architecte en revanche n’est plus là pour apprécier cette décision: il est décédé en août dernier, à 82 ans.
La décision complète du tribunal.