Du 19 mai 2024 au 7 juillet 2024
L’âme du vin chantait dans les bouteilles : la vigne et le vin
Avec Aria Maillot, Giselle Garric, Marie-Claude Cavagnac, Gérard Marty, Maurice Subervie, Jean-Claude Leroux, Guy Sounillac, Cyril hatt et Jean-Luc Fau.
C’est le vers de Charles Baudelaire, extrait du poème « l’âme du vin » (édité dans Les Fleurs du Mal en 1857) qui donne son titre à cette exposition collective autour de la vigne et du vin.
L’artiste et le vigneron ont en commun de puiser leur inspiration dans le vivant. Entremêlés depuis l’Antiquité, l’art et le vin ne cessent de tisser des rapports empiriques, sans cesse redéfinis.
La présence de la vigne dans le vallon de Marcillac, ses implications culturelles, sociales et paysagères ne pouvaient nous laisser insensibles.
Les neuf artistes sollicités ont pour la plupart créé des œuvres spécifiques pour explorer la thématique. L’étendue du sujet méritait des approches et des techniques diverses : ainsi, nous avons de la peinture à l’huile, a l’acrylique, au vin, de la céramique, de la photo, de la sérigraphie, de la sculpture, de l’impression numérique, du dessin… le tout dans un joyeux et enivrant « mescladis » .
Comme pour un vin d’assemblage, nous avons mélangé et dosé les œuvres de ces neuf artistes. A consommer sans modération…
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Aria Maillot: Ma pratique s’articule autour de la peinture et de l’installation, explorant l’expérience humaine d’un point de vue intime. Mes oeuvres forment des narrations personnelles, se transformant jusqu’à devenir ambivalentes.
Fortement influencée par mon ancienne carrière de cuisinière, je transpose cette expérience dans mes processus créatifs. En usant du potentiel de transformation de l’organique et en empruntant des éléments à la peinture symboliste, je crée des parallèles entre les transformations de la matière et les changements inhérents à la condition humaine. Mon travail engage les sens, la matière picturale présente sur mes peintures fait appel à la vue et au toucher, certaines de mes pièces peuvent se boire, s’entendre ou convoquent fortement l’odorat.
Les formats et l’aspect que prennent mes oeuvres invitent à une observation attentive, pouvant susciter des sentiments de séduction et de répulsion. D’une exposition à l’autre, elles se transforment et cohabitent. Elles font partie d’un cycle fragile où l’organique (comestible) joue un rôle essentiel. Mon travail est potentiellement ingérable, assimilable dans notre corps, le rendant d’autant plus intime.
Gisèle Garric: La création à partir de l’argile est pour moi un espace de liberté infini où se rencontrent une fascination pour la nature, la biodiversité et les compositions Allégorique Baroques.
L’impression de « trompe-l’œil », avec les compositions en relief à l’échelle 1, résulte d’un travail préparatoire de modelage et de moulage qui me permet de détourner le réel, pour mieux l’appréhender ou le sublimer peut-être !
Ainsi le naturel fusionne parfois avec l’artificiel, la nature se mêlant à des déchets de la vie quotidienne dans des céramiques improbables qui questionnent la place laissée au vivant dans nos sociétés modernes.…
Grâce aux merveilleux matériaux qu’est la faïence, J’ai pu exprimer le bonheur enfantin de contempler une coquille d’escargot ou bien l’émoi devant un insecte posé sur une simple branche moussue et vermoulue !
J’avais tenté, bien avant la découverte de la terre, de sécher les végétaux pour conserver leur beauté mais une frustration subsistait car les plantes perdaient couleurs, volume et les bêtes pourraient elles aussi revenir à la vie, retourner à l’étang et dans les rivières pour l’éternité !
Il y a sans doute une tentative de conjurer la mort et la finitude, un hymne à la vie.
Marie-Claude Cavagnac
Peindre parce que les choses nous étonnent, nous émerveillent, nous ravissent ou nous effraient, ensuite parce que nous sommes capable d’inventer des possibles, enfin parce que la peinture peut nous faire atteindre les essences les plus secrètes, jusqu’à apercevoir la face cachée de notre lumière. Voilà ce que je ressens lorsque je peins, je préfère une peinture contemplative et silencieuse qui me pose et me donne un bol d’air dans ce monde bruyant. J’aime l’harmonie des couleurs, qu’elle soit en rouge, en gris ou en bleu.
Les grandes plages de vide m’aident à être simplement touchée, elles me rappellent les paysages que j’aime comme l’Aubrac ou le Larzac.
Mais sur cette exposition ce sont les vignes qui sont à l’honneur, les vignes comme des petites parcelles qui monte jusqu’au ciel, des lignes bien dessinées, dans un sens et puis dans un autre et finalement des paysages que je connaissais mal mais que j’ai aimé peindre et qui sont complémentaires des surfaces planes.
J’essaye d’être authentique, sûrement loin des courants de la mode. J’espère transmettre de l’amour au spectateur, c’est la vie se charge de transmettre le reste. J’essaye de capturer la poésie du moment et je fonctionne plus par désir que par goût.
Ma peinture est sur la charnière du figuratif et de l’abstrait, cela permet à chacun de faire son voyage, de se laisser aller au gré du moment.
Gérard Marty
Né en 1955, Gérard Marty, avec sa vision personnelle de conception d’affiches monumentales, interroge le corps et la typo,… surtout le corps!
N’appartenant à aucun champ esthétique, très indépendant, cet immense affichiste crée un univers concret dans lequel l’image glisse facilement de l’univers raffiné et cadré du graphisme à celui plus libre de l’art contemporain.
Les liens entre Gérard Marty et son pays sont forts : il est un formidable ambassadeur de l’Occitanie à travers le monde, ses magnifiques affiches vont dans le sens d’une culture accessible au plus grand nombre de ses followers.
De son atelier de la rue du Prince Noir à Rignac, il questionne les rapports entre l’estofi et le vin de Marcillac tout en grignotant des farcous!
Sur ses affiches présentées à la Galerie de la Cascade, il installe un rythme, un balancement entre le vide et le plein, une dialectique entre la couleur et le blanc dans un chaos qui n’exclut pas l’humour.
Maurice Subervie
Fils d’imprimeurs, j’ai découvert la photographie lors de mes études à Paris, à l’école Estienne (Arts et Métiers du Livre), parce que mes meilleurs potes étaient dans la section photo et que nous partions en week-end, eux avec leurs appareils photo, moi avec ma timidité de provincial au contact de jeunes ‘Titis parisiens’ complètement délurés (1967-1971). (Que serais-je devenu si mon père avait été couvreur me suis-je souvent demandé ? Moi qui ai le vertige debout sur une chaise ! Il y avait à cette époque à Rodez 2 imprimeurs de 80 ans qui travaillaient avec leurs fils de 60 ans, c’était donc une coutume locale de marcher dans les pas de son père.)
Observant mes potes, avide de m’instruire, je me suis rapidement rendu compte qu’avec le même outil, un appareil photo, chacun avait sa manière propre de faire des photos (il faut dire faire des photos et ne pas dire prendre des photos), et surtout, qu’aucun d’eux ne photographiait les mêmes choses.
J’ai vite compris qu’un simple appareil photo remplaçait un crayon, devenant un outil permettant de s’exprimer, de faire passer ses émotions ou de faire passer un message et que, comme en littérature, il était opportun de chercher son propre style, seul moyen d’afficher une identité propre.
Habitant le vallon de Marcillac, je me suis parfois trouvé en situation de réaliser des photos de vignobles à la demande de viticulteurs locaux. J’adore le vin et les pays de vignes, mais j’adore aussi faire des images en sachant qu’elles vont servir à quelque chose. J’ai besoin de cette motivation pour libérer ma créativité. Je ne peux malheureusement pas dire que j’ai beaucoup travaillé sur le sujet, ayant passé une partie de ma vie professionnelle en voyages.
Je suis très heureux de présenter ici quelques images de ce pays.
Jean-Claude Leroux
Recette du MÉLI-MÉLO PICTURAL
Pour une personne
Difficulté : moyenne à experte
Préparation : un certain temps
Cuisson : un temps certain
Il vous faut :
une tranche de Goya, une pointe de Daumier, une asperge violette de Manet, une brioche de Chardin, un entrechat de Degas, une eau-forte de Rembrandt, une cuillère à café de Sargent, un angélus de Millet, un Valentin le désossé de Toulouse-Lautrec, un verre de Whistler, une bouteille de Marcillac.
Dans une cocotte en fonte, sur un fond de Sargent, faite revenir à feu vif Goya. Pendant ce temps désossé Valentin. Puis émincez finement l’angélus. Réservez sans caprices le Goya au four.
Dans la même cocotte, faire suer Chardin, ajoutez y le Toulouse-Lautrec et le Millet. Cuire l’asperge violette de Manet 4 minutes dans l’eau-forte de Rembrandt, additionnée d’une pointe de Daumier.
Durant cette préparation, ayez toujours à l’œil l’entrechat de Degas et à porter de mains un verre de Whistler au cas où ! Mijotez à feu doux le temps qu’il faudra, puis servez sur une toile vierge accompagné de Marcillac.
Bon appétit
Guy Sounillac
« Fuis prière et science et loi : cela vaut mieux.
Va trouver quelques frais minois : cela vaut mieux.
Avant que le destin verse ton sang, viens, verse
Le sang clair de la vigne, et bois : cela vaut mieux. »
Omar KHYYAM
(1048/1131)
Cyril Hatt
« Des objets sont pris en photo en mode automatique à l’aide d’un simple téléphone.
Une fois imprimées, j’agrafe bout à bout les images résultantes pour construire des volumes approximatifs.
Ces œuvres sont le fruit du hasard et de la lumière. »
« Fanatique du ciseau et de la photo, Cyril Hatt semble prendre un certain plaisir à jouer avec notre perception du volume. Depuis 1999, il mène un travail dans lequel la photographie, envisagée comme matériau, subit une série de détournements. Ainsi, ses images sont morcelées, éclatées ou reconstruites, grattées, griffées, déchirées et « réagrafées ». A partir de 2003, apparaissent dans sa production des volumes photographiques. Les objets photographiés, souvent inspirés du Street-Art, sont reproduits à leur échelle en 3D, après avoir subi donc une série d’altérations et de montages. Ils tendent ainsi à recomposer des « paysages d’images » dépossédés de leur fonction originale, tout en restant des images issues de notre quotidien. Paradoxalement bricolé et sophistiqué, le résultat est particulièrement troublant. Ces objets n’ont finalement que leur fragilité à nous offrir, les rendant ainsi sensible et les détachant du ludique ou de l’anecdote. »
Nicolas Rosette
Jean-Luc Fau
Comment représenter l’âme du vin au travers des arts visuels…un challenge qui s’avère plus complexe que la réflexion autour d’une bouteille ne pourrait le laisser croire. Certes l’inspiration semble venir et les idées s’accumuler au fur et a mesure que le niveau du flacon diminue, mais la traduction visuelle n’atteint pas facilement les degrés (spirituels) escomptés. Il faut de la subtilité mais aussi de la puissance, du corps, de la vigueur mais aussi de la légèreté, de la droiture mais aussi une part d’indicible, une alchimie sans chimie qui trouble et emporte, un peu de magie.
Autour de cette thématique, Jean-Luc Fau à comme souvent remis les compteurs à zéro pour aborder le thème de façon spécifique et autonome au travers de différentes pratiques, souvent nouvelles pour lui, avec un coté ludique et jubilatoire concomitantes à la pratique du breuvage Dionysiaque. Quelques peintures anciennes, malgré tout, du fer ou du béton aussi, de la sérigraphie et du dessin. Une diversité d’approches pour aborder la complexité de l’univers du vin.
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