Mort de Pierre Soulages (2): Les réactions nationales et régionales
La mort de Pierre Soulages a suscité de très nombreux hommages, de la part du monde culturel et du monde politique, que ce soit au plan national ou au plan régional, où l’artiste était ancré dans plusieurs territoires (Rodez, Sète, Montpellier).
Petit panorama, non exhaustif.
Au plan national
- Le président de la République Emmanuel Macron, sur twitter: Pierre Soulages avait su réinventer le noir, en y faisant jaillir la lumière. Par-delà le noir, ses œuvres sont des métaphores vives où chacun de nous puise l’espoir.
- La ministre de la Culture Rima Abdul Malak a salué « l’immense artiste qui nous a appris à voir la lumière » et le « magicien de la matière [dont] la carrière éblouissante nous laisse en héritage un imaginaire visuel profondément renouvelé. » La ministre a rappelé la consécration qu’avait reçu le peintre en devenant en 2001 le premier artiste vivant invité à exposer au musée de l’Ermitage de Saint-Pétersbourg, avant d’être célébré au Centre Pompidou en 2009 – à 90 ans – lors de la plus grande rétrospective jamais consacrée à un artiste vivant, puis au Louvre à l’occasion de son centenaire.
- Le directeur du Musée national d’art moderne au centre Pompidou, Xavier Rey: « Pierre Soulages était un géant. Il aura marqué de son génie la vie culturelle et particulièrement celle du Centre dès son ouverture (…) Il était un maître de la matière dont l’héritage est considérable pour les peintres d’aujourd’hui ».
- La Bibliothèque nationale de France rend hommage à Pierre Soulages dont elle conserve une collection d‘estampes : « Il aimait transformer la matière et avait un rapport tactile, presque sensuel au papier ».
- Le collectionneur d’art François Pinault insiste sur la « force et le panache » de celui qui fut pour lui « un ami cher ».
En région
- Benoît Decron, directeur du Musée Soulages: “Cet immense peintre à la longévité exceptionnelle incarnait à lui seul l’art moderne et l’art contemporain depuis l’immédiat après-guerre. Son œuvre commence en 1947-48 avec les peintures au brou de noix dont le musée de Rodez conserve un ensemble majeur, et s’est poursuivie jusqu’à aujourd’hui, Pierre Soulages étant resté actif dans son atelier jusqu’aux derniers jours. (…) Né à Rodez en 1919, dans un quartier d’artisan, Soulages avait choisi avec son épouse Colette, de doter sa ville natale d’un ensemble exceptionnel, augmenté à plusieurs reprises, témoignant des différents moments de son œuvre peint et imprimé. C’est cette magnifique donation de plus de 250 œuvres qui a permis la création du musée Soulages qui conserve aujourd’hui, grâce à la générosité du couple, le fonds le plus complet consacré au peintre depuis ses tout débuts jusqu’aux œuvres les plus récentes. Pierre Soulages, entre 1986 et 1994 a honoré une commande publique exceptionnelle : les vitraux de Sainte-Foye de Conques, des verrières hors norme, translucides et non transparentes. Il avait l’habitude de dire que le cœur battant du musée Soulages était la salle consacrée aux vitraux de Conques. C’est dans cette église qu’il avait eu sa vocation de peintre.
(…) Le musée Soulages a été conçu du vivant du peintre –chose rare– avec une mission particulière que le peintre nous a assigné immédiatement : accueillir les autres mouvements et les autres artistes, Picasso, Calder, Klein, Léger, Le Corbusier, etc.. Soulages luttait contre l’inertie des musées qui ne voit que leurs collections. Cette mission se poursuivra plus que jamais. Le musée Soulages, son équipe dévouée, présente à Colette Soulages et à la famille ses condoléances les plus attristées.» - Le musée Fabre, à Montpellier: “C’est avec une grande tristesse que l’ensemble des équipes du musée Fabre a appris ce mercredi 26 octobre le décès de Pierre Soulages, immense peintre auquel le musée doit tant et avec lequel il était intimement lié.Dès l’âge de vingt ans, en pleine Seconde Guerre mondiale, Pierre Soulages, alors étudiant à l’école des beaux-arts de Montpellier, découvre le musée Fabre au sujet duquel il écrira plus tard : « plus que tout autre, ce musée a compté pour moi ».
Dans les décennies qui suivirent, alors que le peintre connaît très jeune une reconnaissance internationale, plusieurs expositions se tiennent à Montpellier tandis que les premières acquisitions voient le jour. Cette histoire qui unit Pierre Soulages au musée Fabre culmine en 2005 à travers l’exceptionnelle donation de vingt toiles et de dix dépôts, dévoilée au public dans l’aile du musée rénové qui lui est consacrée.
Toute la force de l’œuvre de Pierre Soulages s’y donne à voir, un peintre pour qui l’art ouvrait tous les possibles : « en éprouvant, en vivant les rapports de couleurs, de formes, l’espace, les structures, les rythmes qui sont propres à un artiste, on est introduit à une nouvelle manière de réagir, d’éprouver et de comprendre le monde ; ainsi naissent entre les hommes et le monde de nouveaux rapports, une nouvelle réalité ». Aujourd’hui, toutes nos pensées émues se tournent vers sa famille et particulièrement Colette Soulages qui a tant œuvré à ses côtés pour l’aboutissement de leur donation”. - La présidente de région, Carole Delga: « C’est avec une profonde tristesse que j’ai appris le décès de Pierre Soulages. Outre l’immense artiste qu’il était et restera, il était un complice inspirant, avec qui je partageais l’amour de l’art, du Japon, de l’Aveyron et de Sète. Il y a encore 15 jours, j’ai eu le bonheur de rendre visite à Colette et Pierre, chez eux à Sète. Nous avons évoqué la vie du musée de Rodez, cher à son cœur, pour lequel il avait généreusement fait don en 2020 d’un ensemble d’œuvres pour enrichir ses collections dont le grand Outrenoir du centenaire « Peinture 390 x 130 cm. Nous avons aussi parlé de la prochaine exposition et des interventions du Musée auprès la jeunesse. Comme à chaque rencontre, ensemble nous avons ri.
Son génie a marqué à jamais le monde de l’art contemporain. Inventant l’Outrenoir, il révéla cette lumière secrète venue du noir. Maître de l’estampe, Pierre Soulages ne s’interdisait rien. Il explorait en permanence. Être confronté à son travail est une expérience esthétique unique, forte, bouleversante. Ses œuvres sont pleines d’émotion et de poésie. C’est tout cela que nous avons souhaité partager avec nos concitoyens à travers la création du Musée Soulages qui abrite 250 œuvres données par les époux Soulages, la plus grande collection du Maître au monde.
Pierre Soulages, c’est d’abord Rodez, ville qui l’a vu naître en 1919, mais c’est aussi l’Occitanie, dont il a été tout au long de sa carrière un formidable ambassadeur à travers le monde. Les vitraux à Conques, qui lui insufflèrent sa passion pour l’art, tout comme ses œuvres exposées au Musée Fabre de Montpellier, ainsi que la ville de Sète où il résida, témoignent de l’attachement qu’il portait à notre région. Nous lui rendrons hommage dans les prochains jours.
Mes pensées vont à cet instant à son épouse, à qui j’adresse mon soutien amical, ainsi qu’à tous ses proches. » - Michael Delafosse, maire de Montpellier: “L’immense Pierre #Soulages nous quitte. Je tiens à saluer sa mémoire, étudiant de l’école des beaux-arts de #Montpellier, son œuvre s’empara du monde. Il marque l’histoire de l’art comme celle de la ville avec l’extension du musée Fabre où l’on y découvre la force de son art”.
- François Commeinhes, maire de Sète: « C’est avec une très grande émotion et une profonde tristesse que nous apprenons la disparition de Pierre Soulages. Immense artiste, il nous faisait l’honneur d’avoir élu domicile à Sète depuis 1960 en compagnie de Colette, son épouse et fidèle gardienne du temple. (…) Natif de Rodez, il avait trouvé en île singulière son havre de paix, lumineux et un « horizon vide », nécessaire à sa création. Un horizon nu comme un tableau vierge de toute couleur où le maître s’apprête à déposer le fruit de son inspiration. C’est au milieu des trois incontestables déités si chères à Paul Valéry, à savoir la mer, le ciel et le soleil que Pierre Soulages a consacré sa vie à l’étude de la lumière secrète venue du noir. Un outre noir dont il a fait sa signature et dont les tableaux ornent les salles des plus grands musées du monde.
Amoureux de l’art de vivre sétois, il n’était pas rare de croiser l’homme en noir au détour d’un étal des halles. Mais ces dernières années, le peintre se faisait plus discret, vivant à l’ombre de son pin parasol. Aujourd’hui, le monde perd un immense artiste et la ville de Sète un de ses plus illustres citoyens. La Ville et les Sétois lui sont reconnaissants de les avoir choisis comme port d’attache. Je présente à sa femme Colette, à sa famille et à ses proches mes plus sincères et affectueuses condoléances. » - Christian Teyssèdre, maire de Rodez: “Cela me touche énormément. Le musée Soulages est la vitrine, le moteur, du développement culturel et économique de la ville. Avec cette infrastructure, Pierre Soulages avait envoyé un signe fort, de modernité”.
- Sébastien Bras, chef du restaurant Le Suquet à Laguiole et du café Bras au Musée Soulages, Rodez: “C’est un grand défenseur de notre territoire qui disparaît. C’était une figure internationale de l’art incroyable, un grand personnage, une chance pour le département de l’Aveyron. C’est une grande émotion aujourd’hui de perdre quelqu’un comme lui. J’ai toujours aimé sa simplicité et son rapport très sain à la nourriture. Il appréciait beaucoup la cuisine familiale, de terroir. Une cuisine comme celle que l’on essaie de défendre justement au café Bras au sein du musée Soulages, et qui ne dénote pas, je l’espère, avec sa façon d’aimer la nourriture”.