A Nîmes, l’artiste Salvatore Puglia est parti sur les traces de quatre écrivains dans la garrigue
L’artiste plasticien Salvatore Puglia, qui vit à Nîmes, a réalisé un travail autour de quatre écrivains ayant vécu ou séjourné dans le Gard, de telle manière qu’il en existe des traces dans leurs œuvres. Francis Ponge, Pierre Ménard (alias Jorge Luis Borges), Jean Paulhan et Lion Feuchtwanger.
L’artiste a consacré une série de dix tableaux à chacun de ces écrivains.
Le Conseil Départemental du Gard expose l’ensemble de ce travail dans sa Maison du Département, à Nîmes.
Salvatore Puglia est un artiste plasticien né à Rome dans les années 50. Il vit et travaille à Nîmes où il a exposé à plusieurs reprises. Il a également été en résidence au collège de Manduel dans le cadre du dispositif « Artistes au collège ».
Il se consacre à l’art visuel depuis 1986.
Chercheur en histoire, ses créations sont basées sur des sources littéraires, des recherches historiques et leur traduction par l’image photographique.
Il a écrit pour les revues Quaderni storici, Détail, Linea d’ombra, Revue de Littérature Générale, Vacarme, Lo sciacallo, Mediamatic, Issues in Contemporary Culture and Aesthetics, Any, et dans le seul livre qu’il ait publié, Leaving Pictures/Via dalle immagini, Salerno, 1999.
Présentation de l’exposition par Salvatore Puglia :
Ceci n’est pas à proprement parler un travail artistique*, bien que je me considère avant tout comme un artiste visuel. Il se situe entre recherche historique, critique littéraire et création.
L’inspiration pour cette série d’images sur le territoire des écrivains me vient de la lecture d’un texte littéraire, Le Dépaysement. Voyages en France de Jean-Christophe Bailly.
- Le chapitre sur Nîmes, « Castellum aquae », débute par la définition que Francis Ponge faisait de lui-même : poeta neamusensis. Or, pour un écrivain d’origine nîmoise, ayant passé toute sa vie ailleurs, cette affirmation ne peut tenir qu’à une très grande force symbolique de l’image de cette ville.
Il est évident qu’elle vient de l’héritage de la romanité, de son autorité historique, mais il y a peut-être autre chose. La langue latine, ses dérivations méridionales, l’occitan et le provençal, le fait de se considérer dépositaire et interprète de ce legs. - Jean Paulhan, descendant d’une famille cévenole, lié à Francis Ponge par d’étroits rapports de parenté ainsi que par une forte relation intellectuelle, se voulait descendant d’un Paulianus, consul à Nemausus au début de l’ère chrétienne. Les lettres et les dessins envoyés à ses parents depuis le “masé” du grand-père sont les documents que j’ai voulu accompagner par l’image.
J’ai donc commencé à parcourir les lieux que ces écrivains avaient sans doute parcourus, à la recherche de vestiges à photographier. - Des dessins de Norah Borges, peintre et sœur de l’écrivain argentin Jorge Luis Borges, m’ont amené aux jardins de la Fontaine et à la relecture de Fictions. L’une des nouvelles de ce recueil, Pierre Ménard, auteur du Quichotte, porte en exergue la date Nîmes 1939, alors que, certainement, l’auteur argentin se trouvait à Buenos Aires à ce moment-là. D’ailleurs, toute son œuvre, à l’instar de la nouvelle en question, est un tissu d’embûches dans des méandres historiques et littéraires. Ce qui est avéré, est qu’il avait séjourné dans le Midi et à Nîmes à plusieurs reprises. J’ai justement utilisé sa technique pour mon propre travail, en plaçant des légendes sous des images de lieux qui ne leur correspondaient pas, ou en brouillant les reproductions de textes et les fonds visuels que je leur avais associés.
- Une peinture d’Henry Gowa, La marche de Saint Nicolas, m’a amené sur l’ancienne route départementale entre Nîmes et Uzès. J’ai utilisé le journal de l’écrivain allemand Lion Feuchtwanger, l’auteur du Juif Süss, interné pendant l’été 1940 dans le Camp Saint Nicolas, pour accompagner mes photos de ce qui reste de ce camp et des traces de mémoire, dérisoires peut-être, que j’y ai laissées.
Enfin, les cartes d’état-major qui constituent l’arrière-plan de ces tableaux ne correspondent pas au Camp des garrigues, l’épisode ‘’vichyste’’ (avec son article 17 de l’armistice) n’étant pas unique en Europe. Elles décrivent ici des lieux situés dans les alentours de Rome, ville dont je suis originaire et dont je ne peux pas refuser l’héritage. -
dans la série consacrée à Jean Paulhan Dans la série consacrée à Pierre Ménard