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Ceci n’est pas une céramique

L’artiste belge René Magritte est connu notamment pour un tableau intitulé « Ceci n’est pas une pipe ». La toile représente pourtant bien sans aucune ambiguïté une pipe en bois. Alors? Alors le titre signifie tout simplement qu’on est en face de la représentation d’une pipe, que tout ce qu’il y a à voir est une image: impossible de prendre l’objet, de mettre du tabac dedans et de l’allumer.

L’artiste montpelliérain TTY propose une oeuvre qui d’emblée pose les mêmes types de questionnements: quoi on regarde une de ses « Eternal heads », que voit-on? Une céramique? Une photo numérique? Une photo d’une céramique?

Les repères sont brouillés et l’artiste ne cherche pas à clarifier les choses. Tout son travail repose sur cette ambiguïté fondamentale qui fait qu’on ne sait trop à quoi on a affaire.

Logiquement, l’artiste qui ne dévoile pas trop de choses sur son travail, n’en dévoile guère plus sur sa personnalité. TTY diffuse aujourd’hui largement ses oeuvres sur internet, il est présent dans des galeries prestigieuses hors région et commence à avoir un vrai cercle de collectionneurs. Mais l’artiste préfère ici (volontairement?) rester dans l’ombre. Le nom sonne comme un énigme, aucun portrait autorisé. Ses oeuvres sont parfois virtuelles, et l’artiste lui-même ne souhaite avoir de réalité trop tangible.

« Au Moyen-âge, les artistes s’effaçaient derrière leurs oeuvres », explique sobrement l’artiste, dont on peut juste dire qu’il vit à Montpellier, a fait des études informatiques fort utiles aujourd’hui pour son travail artistique et qu’il est passé par la Villa Arson de Nice.

« Aujourd’hui, nous vivons à mon sens une nouvelle Renaissance: avec les outils de création virtuelle, plus les possibilités toutes récentes en impression 3D, de nouvelles pratiques s’annoncent. Et tout cela se fait en parallèle des travaux du scientifique Craig Venter qui a créé la première cellule vivante par ordinateur (2010). Mon travail est à la croisée de tous ces univers ».

L’oeuvre de TTY ne séduit pas tout le monde, loin s’en faut. Le galeriste montpelliérain Christian Laune (Chantiers BoîteNoire) qui l’a déjà exposé à plusieurs reprises n’est pas plus étonné que cela: « Son oeuvre est vraiment singulière dans l’environnement artistique actuel. Il travaille avec des moyens techniques méconnus et mal considérés par les milieux artistiques classiques. Il mélange la photo argentique, le numérique, les oeuvres en deux dimensions, celles en trois, il propose quelque chose qui est finalement entre deux systèmes, un système futuriste, et un autre plus ‘archaïque’. Devant ses têtes, on peut aussi penser au sculpteur Messerschmidt, qui faisait des têtes de caractère au XVIIIème siècle, même si son personnage à lui ne se caractérise pas par des traits ‘européens’. Finalement son travail est à la limite de beaucoup de choses et cela déroute les directeurs artistiques locaux: de manière externe, il y a aussi de l’art décoratif chez TTY, ou alors du design de luxe, on peut aussi y voir des chinoiseries… Il y a de quoi effectivement rester perplexe! ».

TTY n’aime pas trop détailler sa technique mais indique tout de même qu’il utilise des logiciels conçus pour le cinéma, « mais que je pousse à leurs extrêmes limites pour en faire des mages fixes de grand format et d’une précision indépassable ». Quand le logiciel ne lui permet pas de réaliser ce qu’il souhaite, TTY passe lui-même par l’utilisation de formules mathématiques, quitte à laisser travailler son ordinateur 200 heures pur une seule image.

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LA PETITE DANSEUSE

La petite danseuse a contribué à faire connaître son travail hors de la région. Si la première série peut traître angoissante, l’artiste a suivi l’évolution de la jeune modèle pendant un an et demi pour donner finalement un travail global beaucoup plus positif: dans les dernières photos, en couleurs, la jeune fille s’est transformée en un modèle newtonien affirmant sa féminité retrouvée. Le contraste est saisissant, la Renaissance a eu lieu.

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LES TETES
Un jour ou l’autre, il était écrit que TTY devait rencontrer le médium céramique, celui qu’il représente avec ses outils numériques mais qu’il ne pratique pas. C’est fait et la rencontre donne encore une nouvelle dimension à son travail: « j’ai répondu, il y a deux ans, au Concours international de Création en Porcelaine de Limoges pour réaliser une oeuvre conçue au départ virtuellement et qui ne peut pas être réalisée par la seule main humaine. Aujourd’hui, deux de mes têtes existent en porcelaine, chacune réalisée en huit exemplaires. Chacune a demandé six mois de travail avec la participation de plusieurs étudiants sous la direction de Christian Couty, professeur à l’ENSA de Limoges, pour relever les défis techniques que les professionnels de la porcelaine n’ont jamais rencontrés jusque-là ».

Si au départ on avait donc une photo qui pouvait faire penser à une porcelaine, on a aujourd’hui la porcelaine issue de la photo. Et quand on voit la photo de la porcelaine, difficile de la différencier de la photo qui a préexisté à la sculpture… Les pistes sont définitivement brouillées… On hésite sur les techniques employées, on hésite sur les influences artistiques et maintenant on hésite sur la chronologie des oeuvres.

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