ROUDIL Bruno

Discipline(s)
Dessinateur/trice, Peintre
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M. Bruno ROUDIL

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Mon Histoire

Cette présentation de l’artiste et de son travail a été publiée dans le Livre Artistes Occitanie, les 30 artistes 2022

Aigues-Mortes (30)
Bruno Roudil
La force d’une pelote de traits

Des pelotes de laine détricotées remplissent la toile : certaines pelotes de fil épais, d’autres de fil plus fin, constituant des traits brisés plus ou moins gras, apportant ainsi matière et volume à l’œuvre. Et sur cette trame, l’artiste va ouvrir un semblant de fenêtre, où un ciel de fin de journée laisse apparaître un homme qui réfléchit face à l’horizon.
Tout l’univers de Bruno Roudil est présent dans cette œuvre, MA : le graphisme du trait, libre et aléatoire, parfois régulier (des traits parallèles, des triangles), l’abstraction, des lettres qui sont là davantage pour leur forme que pour passer un message et, si on regarde bien, une sorte de présence humaine, qui est là sans être pour autant au centre de la toile.

“Suivant la densité de mes traits, je peux travailler sur la lumière, comme une pixellisation, pour créer comme une matière et du mouvement : matière à imaginer, matière à embrasser.”
D’autres particularités reviennent régulièrement de toile en toile pour marquer le style de l’artiste : les traits, souvent doublés, comme peut l’être un fil de fer; des objets détournés (grillages, enveloppes, marteaux, …), la ligne blanche qui traverse la toile, ce lettrage inventé, “à la fois vers le mystère et des écritures encore non déchiffrées, ou vers les paysages urbains, chargés de lettres de toutes tailles et de toutes graphies”.
L’œuvre frappe avant tout par sa simplicité et son équilibre. L’originalité du graphisme, la variété des motifs attirent l’œil davantage en- core que la petite scène figurative qui s’y intègre et qui, au final, se trouve mise en valeur.
C’est avec du graphisme en noir et blanc que Bruno Roudil a commencé sa carrière, puis ce fut trente ans de sculpture : les sculptures sont passées du figuratif, voire du surréalisme à un travail plutôt abstrait qu’il propose aujourd’hui en passant par des œuvres issues de ses croquis de sculpteur (silhouettes à tête trouée que nous avons eu l’occasion de découvrir dans plu- sieurs expositions).
Certains des concepts qu’il a créés (sculptures modulaires en deux parties) ont rencontrés un réel succès en France comme à l’étranger.
“depuis 7 ans je propose à nouveaux mes travaux de graphismes” Beaucoup de créativité chez BR avec aussi
une belle collection de dessins en noir et blanc sur papier et sur bois : œuvres abstraites, petits formats aux entités poétiques issues de ses croquis de sculpteur, mondes organiques, microscopiques, aquatiques et telluriques interconnectés.
“Aujourd’hui je travaille plutôt sur toile pour pouvoir proposer du dessin en grand format.”
Son sujet, la recherche de l’équilibre. Equilibre entre le dessin noir et blanc et la cou- leur, celle-ci intervient, mais toujours de manière parcimonieuse et souvent en dé- gradé, avec généralement une, voire deux teintes, rare- ment plus. Equilibre entre liberté et organisation mais aussi dans l’inspiration et dans la construction.
Parfois, la frise d’encadre-
ment, partie constitutive de
l’œuvre à la manière d’Alechinsky, est faite de motifs
géométriques. Parfois elle
sera faite de dessins d’os, l’os
étant un motif signifiant, mais
dans le cadre, pendant que
triques et abstraits habillent littéralement la tête du personnage. Figuratif et abstraction sont étroitement imbriqués, mais dans des rôles parfois inversés.
C’est particulièrement net dans l’œuvre intitulée Les poissons bleus : les poissons représentent une collectivité, mais chacun est emprisonné dans un espace blanc, relié avec les autres par de fragiles épingles à nourrice. Le grillage en haut peut évoquer une épuisette, il peut aussi être juste une autre évocation d’un enfermement, localisé et plus ou moins effrayant (la grille n’est pas si serrée que cela).
Ce qui est sûr, c’est que ces œuvres grouillent de vie, mais que cette vie tient autant aux représentations du vivant (les fleurs, les personnages, les animaux, les oi- seaux, les empreintes de pied, les os, etc.) qu’à la dynamique du trait, à ses couches géologiques, autre particularité de l’artiste, qui alterne différents motifs pour remplir des villes, des montagnes, voire une figure humaine. Il s’en dégage quelque chose de rythmé, et donc de musical. Sans doute pas un hasard : “L’im- provisation musicale m’a beaucoup aidé pour être plus à l’écoute de ce que me chuchote chaque œuvre avant de dévoiler son âme. L’harmonie, le rythme, le mouvement, autant de points communs avec la musique.”
Le résultat est le fruit d’une longue maturation. L’artiste arrive à créer une histoire derrière la toile, comme cette œuvre intitulée parfaitement “ Evocabulaire ” : un fond de fil enchevêtrés comme souvent, mais de cet amas s’imposent quelques formes ovoïdes, comme les signes d’une vie micro ou macroscopique. Et par-dessus, d’un rouge qui s’impose, des lettres d’un
alphabet inconnu. L’œuvre est graphique, très contemporaine, belle à contempler et reste en même temps une porte ouverte sur une histoire qu’on n’a pas encore déchiffrée.
L’artiste part souvent d’une idée, d’une intention plus que d’une idée de représentation du réel. C’est ainsi que pour la toile “le plaisir divin”, avec cette divinité qui surplombe la cité, son intention était de trouver une évocation de ces deux mots, plaisir et divin : “Je voulais travailler sur la lumière et le plaisir. Le plaisir divin, c’est à la fois cette quête de lumière qui tire vers le haut, et le plaisir
qu’on peut trouver au quotidien dans des choses aussi dérisoires que de se gratter le dos.” L’humour laisse beau- coup de traces de son passage dans l’œuvre de Bruno Roudil et fait partie intégrante de son style, témoin de sa liberté et sa sincérité.

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BIO
Bruno Roudil commence par des dessins à l’encre de Chine, dont certains illustreront la revue nationale de S.O.S Amitié à la fin des années 1970. C’est aussi l’époque de sa première exposition de dessins à Marseille. Reçu au concours d’entrée aux beaux-arts d’Aix-en-Provence, il opte pour une vie “à la campagne” dans le Gard avec la fabrication d’objets en bois (tournés, sculptés). Ce fut ensuite la rencontre avec la terre et le modelage voici 25 ans. Un travail avec les enfants en milieu scolaire autour du modelage lui a permis d’élaborer par la suite des modules de stages pour adultes.
Une création sans cesse en mouvement qui se métamorphose. L’influence du surréalisme de ses débuts “parfume” parfois certaines de ses compositions d’aujourd’hui.
Il privilégie le mouvement qui s’inscrit jusque dans un trait libre et dynamique, souvent comme un fil de fer qui nous relie à des propositions singulières.

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