FIGUERES Pere

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Sculpteur
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M. Pere FIGUERES


Mon Histoire

Pere Figueres donne vie au liège
(Article rédigé par Anne Devailly, 2015, magazine Art dans l’Air)

Pere Figueres écrit, compose, chante et joue de la guitare. Ce catalan pur jus a ajouté une activité depuis quelques années: la sculpture de bouchons en liège.

Jusqu’à sa retraite, Pere Figueres cultivait la vigne. Il était donc familier de longue date de tout ce qui touche à la viticulture: les cannes de roseau qui servent de support, les bouteilles, le liège des bouchons, les capsules et les mantelets, ces petits fils métalliques qui tiennent la capsule sur le bouchon.
Mais s’il connaissait tous ces produits, il n’ avait pas eu l’idée ni le temps de les prendre comme objets de création. Pere Figueres était déjà artiste, mais son art était exclusivement tourné vers la poésie catalane, l’écriture de chansons et la guitare, au point d’être l’une des figures de proue de la chanson catalane, des deux côtés de la frontière.
Depuis sa retraite donc, il continue de manipuler bouchons, capsules et mantelets.
“Au départ, j’ai tordu les fils de fer des mantelets, et puis je suis passé aux bouchons de liège”.
Et voilà comment sont nés de très nombreux personnages, totems, statues, aux traits primitifs mais tous différents les uns des autres: avec quelques bouts de liège collés, l’artiste arrive à varier les yeux, sourcils, nez et bouches qui constituent les quatre éléments de la plupart des visages (auxquels il faut parfois rajouter langue ou oreilles).
Pour cela, il travaille avec un couteau très aiguisé, parfois tellement aiguisé … que les doigts n’y échappent pas. Pere Figueres avoue plusieurs petits passages aux urgences et une bonne dizaine de points dans les mains. “Le liège n’est pas une matière uniforme: parfois le couteau avance sans difficulté, et parfois au contraire la matière oppose davantage de résistance”.
Une fois les bouts découpés, collés, l’artiste ponce l’ensemble pour lui donner un air uniforme, pour faire disparaître les traces du montage initial et pour donner ainsi davantage de vie aux personnages.
Certains sont simples et reposent sur un petit socle: d’autres prennent de la hauteur, juchés sur un canisse lui-même planté dans un caillou évidé qui sert de socle; d’autres semblent faits d’un bloc mais ont la hauteur de trois, voire quatre bouchons de liège assemblés sans qu’on s’en rende compte. Il y a encore ceux qui ont une partie mobile; comme une mini-girouette; ceux qui intègrent quelques éléments en plus: des fils de fer des mantelets, quelques petits graviers pour les yeux, quand ce ne sont pas des tout petits bouts de canisses évidés.
Enfin, ceux, plus rares, qui sont réunis sur des tableaux-sculptures, sur fond de liège bien évidemment.
Tous sont faits à partir de bouchons de … champagne! “Contrairement aux bouchons de vin qu’on abime quand on ouvre une bouteille, les bouchons de champagne restent entiers une fois la bouteille ouverte. Aujourd’hui, j’ai de nombreux amis qui me les mettent de côté, et même quelques restaurants!”
Tout ce petit peuple forme ce que l’artiste appelle des Kanyataps. “Je suis catalan, indépendantiste, et je fais des objets qui peuvent faire penser à l’art tribal et qui sont sculptés dans une matière végétale. Tout cela faisait des liens avec le peuple kanak qui lui aussi aimerait obtenir son indépendance. J’ai donc trouvé un mot qui peut faire penser à ce peuple avec lequel je me sens proche”.
“Je suis évidemment pour l’indépendance de la Catalogne, et je revendique le droit des peuples à se déterminer eux-mêmes, comme celui du peuple kanak et de tous ceux qui luttent pour la reconnaissance de leurs cultures”. Pere Figueres fait le lien entre son activité de chanteur et celle du sculpteur, par le biais d ela politique:
“Depuis 1659, le Roussillon est devenu français par la force, et depuis cette date, la France essaie de faire disparaître la culture catalane. C’est pour cela que mon engagement est poétique, musical et maintenant ce travail de sculptures est pour moi une revendication qui va dans le sens d’une reconnaissance de ma culture, de ma langue dans cette Europe en pleine révolution”.

Pere Figueres n’a donc fait que changer de vocabulaire, pas de discours.
D’ailleurs, musicien dans l’âme, il ‘est resté en manipulant les éléments viticoles il s’est par exemple amusés à créer quelques instruments de musique qui restent aujourd’hui sans nom: comme cet assemblage de capsules sonores. Les capsules sont réunies deux par deux au milieu de chaque binôme, un petit caillou. Les fils de mantelets permettent de réunir toutes les paires et de créer ainsi un instrument rythmique à la fois original et esthétique.
Avec les mantelets, l’artiste a également créé tout un petit peuple de personnages, sexués ou non, immobiles ou en mouvement. Rassemblés sur une planche de liège, ils sont tous dotés du’ne punaise de couleur en guise de tête, ce qui rajoute à la diversité de l’senemble.
Pere Figueres s’amuse, et entraîne son public dans un petit monde d’invention sorti de trois fois rien: un peu de liège, quelques punaises, quelques fils de fer et beaucoup d’imagination.

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