Clarissa Marissal Nansouty pratique la peinture en techniques mixtes, et crée des compositions abstraites. Sa démarche expérimentale l’a conduite dans ses recherches à varier les méthodes explorées telles que le cyanotype, le sténopé et le monotype. Investie dans des problématiques de maîtrise des supports et des matières fluides, elle ne cesse de générer des figures. Elle expérimente le geste et développe des modes de création intuitifs.
Le biomorphisme caractérise son œuvre abstraite dont les formes sont empruntées à la nature, à l’univers organique et représentées de façon simplifiée et graphique.
Elle décompose ses peintures ce qui l’amène à reconstruire et à créer des images, parfois tissées selon une élaboration structurée ; le papier encré devenant alors la matière avec laquelle elle cherche de nouvelles formes visuelles. Sa production plastique s’appuie alors sur un répertoire de formes non orientées.
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Article paru dans le livre Artistes Occitanie, les 30 artistes 2024:
Tissage d’images
Dans son atelier, Clarissa Marissal Nansouty dessine. Parfois des dessins qui sont une finalité en soi, parfois des dessins qui sont d’emblée pensés pour dialoguer avec d’autres, dans un tissage postérieur.
Les traits de pinceaux sont légers, aériens et laissent sur la feuille des formes qui évoquent clairement un univers végétal, voire maritime: des ondulations, des feuilles dans le vent, des vagues à la surface de la mer. Au choix. Ou alors rien de tout ça: juste des formes qui se multiplient sur la page réalisées par une artiste à la recherche d’un équilibre avant toute chose. La plupart du temps à l’encre de Chine plus ou moins diluée, parfois avec une encre de couleur, , de l’aquarelle, du broux de noix.
Une grande partie de ses travaux sont issues de techniques du sumi-e ou suiboku-ga, qui est un mouvement de la peinture japonaise originaire de Chine. Ce courant se caractérise par l’usage du lavis à l’encre noire.
L’artiste pratique et expérimente d’autres techniques, toujours au service de compositions abstraites équilibrées, notamment le cyanotype ou le monotype.
Quel que soit le medium, la problématique est la même: la maîtrise des supports et des matières, la possibilité de générer des figures, la volonté de finir par trouver des modes de création intuitifs.
Dans tous les cas, son oeuvre se caractérise par des formes empruntées à la nature, à l’univers organique et représentées de façon stylisée et graphique.
Voilà le point de départ de Clarissa Marissal Nansouty dans son atelier de Bagnères de Bigorre.
Mais ces dessins sur feuilles blanches ou toiles de lin, ces cyanotypes, etc, ne sont qu’un point de départ. Bientôt l’artiste va prendre ses cutters et scalpels pour découper deux de ses oeuvres en bandelettes de largeurs identiques ou variées. « Cela me permet d’avoir des rythmes graphiques variés et imprévisibles. L’entrecroisement du papier enrichit la texture et le motif initial. J’aime jouer avec l’opposition des formes et des mouvements, ce qui accroît le rendu final de la composition. »
Elle pourra alors assembler ses bandes de papier ou de toiles de peintre, comme le ferait un tisserand sur son métier.
Clarissa Marissal Nansouty est donc paradoxalement dans une mouvance actuelle – l’art textile a le vent en poupe – sans pour autant utiliser le support en question. Elle tisse, mais son medium à elle reste l’encre, le papier ou la toile de lin enduite de peinture.
“Je réalise certains dessins, notamment tous ceux de la série Matières, dans une intention dès le départ de les utiliser pour faire des oeuvres tissées: leurs réalisations est donc intellectuellement anticipées, leur assemblage n’est pas un hasard. Je travaille le plus souvent à partir de prototypes de tailles réduites. »
D’où un équilibre évident qui apparaît dans ces tissages: équilibre dans l’occupation de l’espace, équilibre dans l’intervention de la couleur, comme dans Interstices XVII, où le rouge est rose en haut, puis se densifie en même temps qu’il rencontre le motif du dessin qu’il entrecroise, avant de s’en éloigner dans la partie basse. Dans cette œuvre, le travail de l’artiste s’apparente à une symphonie musicale ou le créateur croise les thèmes, les fait grandir, disparaître, revenir.
Parfois le tissage se termine par des franges d’une des lisses, comme les franges d’un tapis. Mais celles-ci ne restent pas vierges. Ces bandelettes portent une partie du dessin et permettent d’avoir un aperçu de l’oeuvre avant le tissage. C’est par exemple le cas de cette œuvre abstraite dans sa partie haute, et végétale en dessous. Comme si la nature reprenait ses droits après avoir été bousculée par l’artiste.
Clarissa Marissal Nansouty anticipe donc sur ce que le croisement des bandelettes peut donner… même si parfois elle ne se résout pas à découper le dessin qu’elle vient de réaliser: “Il faut bien admettre que parfois, je les garde tels quels!”
Devant ce constat, l’artiste a alors fait évoluer son travail: elle ne se focalise plus uniquement sur les tissages, mais sur des triptyques qui permettent de voir à la fois une œuvre tissée et deux œuvres d’une même inspiration mais restées entières.
Elle propose alors un ensemble de trois œuvres, mais qui sont constituées de 4 au départ: deux sont tissées pour n’en faire plus qu’une et les deux autres sont exposées entières et ensemble. Un travail qui accroît la difficulté, puisqu’il faut à la fois l’équilibre de l’œuvre tissée et la cohérence des trois œuvres montrées ensemble.
“C’est un travail très stimulant, car il faut que l’ensemble ait du sens, que le public comprenne pourquoi ils forment un tout”, précise l’artiste.
Elle n’est pas la première à travailler le croisement des papiers. Elle s’inscrit même dans les pas d’un grand artiste de la région, François Rouan, dont les œuvres avaient été exposées au Musée Fabre à Montpellier en 2017, dans une exposition intitulée simplement Tressages. Mais contrairement à Rouan qui jouait pleinement de la vibration de la couleur, Clarissa Marissal Nansouty reste sur des oeuvres ou dominent la courbure du trait noir dans ses dernières séries.
Mais tous les deux, par le biais du tissage, se rejoignent sur ce constat, fait par François Rouan: « La peinture véritable se révèle là où l’objet opère une résistance à livrer entièrement son image. »
Anne Devailly
BIO
Née en 1980, Clarissa Marissal Nansouty, a suivi des études universitaires en histoire de l’art.
Depuis 2003, elle travaille dans le domaine de l’événementiel aux postes de coordinatrice, régisseuse, commissaire d’exposition et directrice artistique de projets culturels dans les Hautes Pyrénées ( Zic’Azimut, Random, Centre Maintenon, Laboratoire d’art à durée déterminée et Fraktal).
Entre 2009 et 2014, elle a réalisé des interventions théâtrales dans la compagnie La Wouakatchie de la Mélodie.
Depuis 2015 elle développe son activité scénique en proposant des interventions lors de spectacles où elle crée des ambiances visuelles. Lors de ses performances live, elle collabore, sous le pseudonyme ‘soen’ avec différentes formations de musique électro acoustique et expérimentale improvisée.
Elle travaille actuellement sur les projets “Sòmilutz” avec Gilles Vignes, « Aciers liquides » avec Claude Pascal et « Doux Éclat » avec Simon Menier : duos d’artistes qui unissent les univers de leurs recherches respectives dans le domaine du son et des arts plastiques.
Arteyran (34) Teyran - 2017
Udazken'ART (64) Bayonne - 2018
OstéoCam (18) Bourges - 2019
Atelier 20 (65) Tarbes - 2020
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