BUTSAVAGE Sarah

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Mme Sarah BUTSAVAGE

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Sarah Butsavage peint des paysages abstraits, des endroits où elle aimerait aller, où elle va… en les créant. Elle décore ces espaces avec des sujets et des symboles qui touchent à la féminité, la métaphore, le paradoxe, l’enfance et l’ambiguïté de l’existence. Montaigne suggère dans son essai « de la solitude » que l’on devrait envisager un espace mental privé dans lequel personne ne pourrait entrer ; une « arrière-boutique » pour le développement de soi. Puisque la conscience est la nôtre, nous pouvons embrasser cette analogie pour créer un espace où l’on développe l’éthique, le soin, la créativité, etc. Les peintures de l’artistes nous permettent de jeter un coup d’œil à son « arrière-boutique » et de voir des bouts de l’espace lui-même, en constante évolution, et les sujets à l’intérieur que sa curiosité examine.

Sarah Butsavage a toujours été charmée par la façon dont le surréalisme est organique. Dès qu’on est capable de se souvenir d’un rêve, on voit combien il est humain que notre imagination crée des collages de ce que nous vivons. Ceci, associé à la fabrication de marques primitives et à l’expressionnisme, pousse sa main à dessiner. Grâce à cela, elle crée des peintures avec des palettes colorées et des images ludiques.

L’artiste utilise de la peinture acrylique qui sert souvent de « sous-couche » pour les pastels à l’huile utilisés pour dessiner « par-dessus ». Elle a toujours eu du plaisir à voir une image, latente, et à la faire apparaître avec sa main sur du papier. Elle aime l’intimité et l’immédiateté de la création du dessin au trait. Vous l’imaginez, vous le faites, il est là.

Sarah Butsavage est une peintre américaine née à Philadelphie, en Pennsylvanie. Elle a obtenu sa licence en beaux-arts à la School of Visual Arts de New York en 2012. Elle vit et travaille à Toulouse.
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Article paru dans le livre Artistes Occitanie, les 30 artistes 2023

Toulouse
Sarah Butsavage
Le trait et la couleur dans un rapport complexe

Installée à Toulouse, l’américaine Sarah Butsavage propose une peinture qui fait se dialoguer la couleur et le trait, dans une grande variété de propositions: la couleur qui magnifie le trait, le trait qui ignore la couleur, la couleur qui contredit le motif, etc. De quoi créer un univers gai et coloré mais qui cache un rapport au monde plus complexe qu’il n’y paraît.

Depuis qu’elle montre ses travaux, Sarah Butsavage a toujours eu une palette harmonieuse et vive, qui définit un univers avant même qu’on se penche sur les motifs représentés. La tonalité est gaie et les sujets, qui tournent autour de la figure humaine, sont dessinés à gros traits dans cet environnement.
Mais en 2016-2017, l’artiste fait évoluer son art en choisissant une technique précise, qui est devenue sa marque de fabrique: “je travaille sur une même toile à l’acrylique et aux pastels fluides. Je commence toujours par l’acrylique que je pose en aplats de couleur, ce quii me permet de donner tout de suite l’harmonie et la composition de la toile, et j’ajoute ensuite les traits avec le pastel. Cela me permet de concilier la peinture et le dessin, tout en me concentrant d’abord sur l’un puis ensuite sur l’autre”.
Voilà donc à quoi ressemblent depuis lors ses toiles: des aplats de couleur vives, sur lesquels viennent se greffer des traits de dessin, représentant la plupart du temps des figures humaines. Voilà, très rapidement définie, la façon de procéder de Sara Butsavage aujourd’hui.
Mais cette description schématise un travail nettement plus complexe. Car les aplats et le dessin ne sont pas indépendants l’un de l’autre et entretiennent des relations parfois inattendues.
Il y a le cas, fréquent, où l’artiste se laisse guider par sa palette. C’est alors une envie de couleurs qui prédomine et qui va mener l’artiste à se concentrer avant tout sur l’équilibre et l’harmonie colorée qui s’installent peu à peu sur la toile. Le dessin viendra après, inspiré par les formes posées sur la feuille…, respectueux des cadres que lui offrent ces différents aplats colorés, “un peu à la manière d’un cadavre exquis”, précise l’artiste.
Dans Régression infinie, les éléments dessinés prennent tous pour support un pavé de couleur précis, ce qui donne un ensemble équilibré, serain, ou chaque chose est à sa place, valorisée par la forme colorée qui lui sert de cadre. Mais déjà, on a un doute: “j’ai quand même toujours en tête le fait de laisser cela un peu de travers, bancal”, explique l’artiste. C’est ludique, mais c’est aussi un point de vue sur l’existence. Point de vue plus fermement affirmé par le titre, Régression infinie, qui emmène la réflexion un peu plus loin, comme si cette femme n’arrivait pas à recoller les morceaux, entre tout ce qui constitue son quotidien, engluée entre des éléments matériels (bijoux, chandelier), des éléments vitaux (les fruit), et sa propre personne coupée en au moins trois morceaux (le visage, la main, le sein).
Sarah Butsavage parvient ainsi à amener le regard, par une toile réellement séduisante grâce à sa maîtrise des couleurs de la construction, pour déboucher sur des interrogations qui lui tiennent à coeur: “J’aime parler de la figure humaine, j’aime essayer de raconter des histoires, mais bien souvent, ce qui en ressort, c’est tout de même cette espèce d’ambiguité dans laquelle on doit se débattre: on est corps et esprit, on est sujet et objet, on est un personnage central et un simple point dans l’univers. Kierkegaard appelait cela ‘le vertige de la liberté’. Beaucoup de mes toiles essaient d’illustrer cette idée: on est coincé dans son corps, dans un lieu, dans une rivière temporelle”.
Ces interrogations sont évidemment beaucoup plus limpides quand le trait se pose sans tenir compte des carrés de couleurs: Dans la toile intitulée le Poids, le personnage traverse les différentes couleurs, comme si la couleur et le trait ne cherchaient même plus à établir le moindre dialogue. La femme est assise, la tête dans la main, mais sans la légèreté et la concentration du penseur de Rodin: elle subit le poids de son corps, les couleurs de son environnement, la fragilité de son trait. Les couleurs ne sont plus des cadres qui valorisent le sujet, mais une tapisserie posée au fond et le personnage “doit faire avec”.
Cette déstructuration entre la couleur et le trait est encore visible dans une toile intitulée “J’ai énormément de choses à dire” : la femme, en morceaux fait sa gymnastique ou sa toilette, mais le regard et la main tendent vers l’extérieur, comme si elles cherchaient à s’extraire de ces aplats colorés. “
Et puis il y a encore un autre cas: les couleurs ne sont pas si abstraites que cela, elles participent déjà à l’histoire que l’artiste souhaite nous raconter. C’est par exemple visible dans Avenue Fernwood, réalisée en 2022: la fenêtre et son ombre portée sont représentées par la couleur et non par un trait postérieur.
C’est aussi le cas du portrait de Julien, le mari de l’artiste: les zones colorées sont clairement là pour accueillir des éléments d’une nature morte (chandelier, bouteilles, corbeille de fruits) ou différentes portions du corps de la personne représentée. Pas de hasard cette fois-ci dans la palette mais une oeuvre au contraire extrêmement construite où le personnage prend vie à la fois par la palette (classique, sobre), par son attitude (ouverte au dialogue, les mains en mouvement) et par les objets qui l’entourent (une nature morte qui suggère un lien à l’art). Même chose avec un sujet plus rare chez l’artiste, une nature morte à la manière des Flamands au XVIIè: Sarah Butsavage a posé ses carrés de couleurs et chaque petit carré va accueillir ensuite une fleur dessinée à gros trait. “C’est une oeuvre que j’ai voulu faire pour fêter les trois mois de mon fils! Clairement, une envie de couleur, de lumière, et pourquoi pas de fleurs, mais le tout dans la légèreté et la spontanéité liées au monde de l’enfance”.
Bref, ce qui est passionnant dans la peinture de cette artiste, c’est bien ce rapport complexe entre le trait et la couleur, qui peut avoir la légèreté d’une peinture enfantine, ou emporter vers des considérations plus angoissantes sur le monde qui nous entoure.
Anne Devailly

BIO
Américaine, qui a passé toute sa vie américaine sur la côte Est:native de Philadelphie, elle a ensuite habité Atlanta avant d’étudier (bachelor of Arts) puis de vivre à New York pendant huit ans.
En 2016, elle rejoint son futur mari français à Toulouse où elle réside à présent.
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« Les 30 Artistes Occitanie »
Présent dans l'édition 2020 ou 2021
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