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L’artiste sétois Hervé di Rosa reçoit de nombreux soutiens après la polémique autour d’une de ses fresques

L’artiste sétois Hervé di Rosa a réalisé plusieurs fresques au Palais Bourbon en 1991, devant lesquelles passent tous les jours de nombreux députés ou visiteurs. Ces fresques visent à commémorer quelques grandes dates de l’histoire de la République française, dont la loi d’abolition de l’esclavage en 1794.
Vingt-huit ans après, l’écrivain Julien Suaudeau et la réalisatrice Mame-Fatou Niang ont lancé une pétition pour demander le retrait de cette fresque, qui serait porteuse d’une vision raciste des esclaves africains. Pour les auteurs de la pétition, l’iconographie de Di Rosa s’apparente “à une imagerie hésitant entre Banania et Tintin au Congo”.


L’artiste a été surpris et consterné par cette demande, qui est faite au moment où l’exposition qu’il a montée au MIAM à Sète et qui permet aux Français de découvrir les artistes de Kinshasa, est prolongée jusqu’au 2 juin en raison de son succès. L’exposition sera présentée à Paris, à la Cité de l’architecture et du patrimoine au printemps 2020.

Il a immédiatement expliqué pour ceux qui ne connaissent pas son travail que les deux visages d’esclaves, aux lèvres surdimensionnées, sont inspirées de sa série des Renés où tous les personnages, quelle que soit la couleur de la peau, sont représentés de la même manière.
Il estime que ce n’est pas un hasard si la demande de censure émane de deux universitaires qui travaillent tous les deux dans des universités américaines, un pays où les actions anti-racistes se caractérisent par une virulence et une radicalité spécifiques.

Si la pétition a réuni rapidement plus d’un millier de signatures, de nombreuses personnes ont également apporté leur soutien à l’artiste:

Le maire de Sète, François Commeinhes lui a apporté son soutien sur les réseaux sociaux, avec un post concis mais explicite:  «Tout ce qui est excessif est insignifiant ».

L’Observatoire de la liberté de création (fondé par la Ligue des droits de l’homme) a lui aussi rejeté cette demande de censure:

“Si l’œuvre de Hervé Di Rosa consacrée à l’abolition de l’esclavage ‘n’a pas sa place à l’Assemblée nationale’, pourquoi avoir attendu si longtemps (l’une des pétitionnaires indique l’avoir vue il y a un an, et l’œuvre est exposée depuis 28 ans) pour la dénoncer ? C’est que l’offense, sans doute ressentie de façon sincère, attendait son agenda. L’annulation des Suppliantes d’Eschyle à la Sorbonne, le mois dernier, semble avoir ouvert la voie à cette nouvelle demande de censure qui fait l’économie de plusieurs points fondamentaux.

Cette œuvre est entourée d’autres œuvres du même artiste qu’il suffit de regarder pour voir que les traits reprochés, notamment la bouche surdimensionnée, se retrouvent dans tous les personnages de Di Rosa, quelle que soit la couleur de leur peau. Il en va de même pour les yeux, qui ne sont pas exorbités mais surdimensionnés. Le sourire des personnages de Di Rosa n’est ni béat ni carnassier, ou s’il l’est, cela relève d’une interprétation qu’il appartient à celui qui l’émet de défendre dans le cadre du débat critique. Il est symptomatique qu’à l’appui de l’accusation de racisme émise contre l’œuvre les signataires de cette tribune recourent (comme tous les censeurs) à des arguments qui relèvent à l’évidence de la subjectivité.

L’Observatoire de la liberté de création ne peut donc que RÉAFFIRMER ce que la Cour européenne des droits de l’Homme rappelle tout au long de sa jurisprudence : les œuvres sont libres, y compris libres de choquer, elles sont polysémiques et donc offertes au débat quant à leur interprétation. Dès lors qu’elles ne sont pas fondées sur un projet intentionnellement et explicitement discriminatoire (ce qui constituerait une limite légitime à la liberté de création, comme l’ont jugé les tribunaux à propos de Dieudonné par exemple), elles ne peuvent être censurées.

Si certains pensent le contraire, qu’ils saisissent les tribunaux, auxquels la pétition de quelques-uns ne saurait se substituer”.

Paris, le 11 avril 2019

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